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HAUTES-ALPES (05)



TRIBUNAL ADMINISTRATIF DE MARSEILLE
0703746
Mme G et autres
M. Bernabeu Rapporteur
M. Gonneau Commissaire du gouvernement
Audience du 24 novembre 2008
Lecture du 4 décembre 2008
RÉPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Le Tribunal administratif de Marseille
(11éme chambre)

49-05-05

Vu la requête- enregistrée le 13 juin 2007, présentée par Mme G, demeurant à Ribeyret (05150). Mme B, demeurant à Ribeyret (05150), par M B, demeurant à Ribeyret (05150), par M. B, demeurant à Ribeyret (05150) et par Mme K, demeurant à Ribeyret (05150), représentés par Mme G ;

Mme G et autres demandent au Tribunal : Mme G et autres soutiennent que leur requête est recevable s'agissant de l’intérêt leur donnant qualité pour agir ; que l'arrêté est entaché d'illégalité externe dès lors que la commune de Ribeyret ne peut être considérée comme ayant délibéré sur le projet qui a été substantiellement modifié, que l'avis de la commission départementale de la nature, des paysages et des sites du 19 février 2007 est irrégulier et qu'aucune concertation préalable avec les habitants n'a été organisée ; que l'arrêté méconnaît l'article 10 de la loi du 10 février 2000 et l'instruction du 19 juin 2006 dés lors que les conditions de création d'une ZDE ne sont pas remplies ; que le potentiel éolien du site n'est pas établi, que la capacité de raccordement du site est insuffisante et que la protection des paysages, des monuments historiques, des sites remarquables et protégés n'est pas établie ; que les enjeux patrimoniaux et paysagers sont insuffisants, que le périmètre exact de la ZDE n'est pas connu, que la complexité paysagère n'est pas étudiée et que la compatibilité des implantations éoliennes avec le patrimoine et les paysages a été sous-estimée, s'agissant notamment de la visibilité du projet ;

Vu l'arrêté attaqué ;

Vu le mémoire, enregistré le 12 septembre 2007, présenté par la société Tencia qui fait valoir qu'elle n'entend pas produire de mémoire dans le cadre de l'instance ;

Vu, enregistrés les 7 et 23 novembre 2007, les mémoires en défense présentés par les communes de Montjay, l'Epine, Ribeyret et Sorbiers, représentées devant le Tribunal par le maire de Montjay et concluant au rejet de la requête ; elles font valoir que le projet présente un intérêt certain au regard de la nécessité de développer de nouvelles énergies ; que seulement 572 hectares seront concernés par le projet et que des arbitrages entre communes sont possibles ; que les écritures des requérants connaissent de nombreuses contre-vérités ; que la commission des sites n'a pas rendu un avis irrégulier ; que la commune de l'Epine a bien approuvé le contrat de réservation et le bail emphytéotique ;

Vu, enregistrés les 4 et 19 décembre 2007, les mémoires en réplique présentés, par Mme G et autres et concluant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; ils soutiennent, en outre, qu'ils sont résidents permanents de la commune de Ribeyret ; que les éoliennes seront d'une hauteur de 140 à 150 mètres ; que la forêt sera confrontée à d'importants risques d'incendie alors qu'elle est protégée au titre de l'article L. 113-1 du code rural ; que la commission des sites n'a pas disposé des informations requises s'agissant de la hauteur réelle d'une crête ; que les aspects environnementaux du projet sont insuffisants et que la capacité financière de la société Tencia est insuffisante, que la commune de Ribeyret ne s'est pas prononcée en faveur de la création d'un SIVU, que la société Tencia souhaite se retirer du projet en raison des mauvais résultats de la mesure des vents ;

Vu, enregistré le 2 mai 2008, le mémoire en défense présenté par le préfet des Hautes-Alpes qui conclut au rejet de la requête ; il fait valoir que la délibération du conseil municipal de la commune de Ribeyret est régulière et que les modifications du projet n'étaient pas de nature à remettre en cause son économie générale d'autant que le préfet peut arrêter un périmètre de ZDE différent de celui proposé par les communes : que l'avis de la commission des sites est régulier au regard notamment de l'article R. 341-25 du code de l'environnement ; que l'instruction du 19 juin 2006 est dépourvue de valeur réglementaire et qu'en tout état de cause, des réunions publiques ont été organisées : qu'une ZDE n'est pas un document d'urbanisme et qu'il n'a pas à être soumis à une enquête publique ou à une étude d'impact ; que le potentiel du site est réel et que le législateur n'exige pas de mesure systématique des vents ; que la station météorologique, située à 40 km du site, pouvait être utilisée : que les capacités de raccordement du site sont réelles et que la protection des paysages, monuments historiques et sites remarquables et protégés a bien été prise en compte ; que des études complémentaires plus fines seront réalisées au stade de la délivrance des permis de construire ; que les enjeux patrimoniaux et paysagers ont été pris en compte, tout autant que la complexité paysagère d'autant que la hauteur des éoliennes n'est pas connue ; que la compatibilité des implantations éoliennes avec le patrimoine et les paysages n'a pas été sous-estimée ;

Vu, enregistré le 9 juin 2008, le nouveau mémoire présenté par Mme G et autres et concluant aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens ; ils soutiennent, en outre, que la circulaire du 19 juin 2006 a un caractère impératif et qu'elle est invocable,

Vu, enregistré par télécopie le 10 Juillet 2008 et régularisé le 15 juillet suivant, le nouveau mémoire en défense présenté par le préfet des Hautes-Alpes et concluant aux mêmes fins que son précédent mémoire par les mêmes motifs ; il fait valoir, en outre, que les ZDE ne constituent pas une autorisation de construire mais permettent de bénéficier d'une autorisation d'achat de l'énergie produite aux tarifs fixée par la loi ;

Vu l'ordonnance en date du 18 juin 2008 fixant la clôture de l'instruction au 11 juillet 2008 à 12h ;

Vu le mémoire enregistré le 19 août 2008, présenté par Mme G et autres ;

Vu les autres pièces du dossier,

Vu le code de l'environnement ;

Vu la loi modifiée n°2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l'électricité ;

Vu le code de Justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience,

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 décembre 200S : Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que Mme G et autres demandent l'annulation de l'arrêté du préfet des Hautes-Alpes en date du 10 avril 2007 portant création de la zone de développement éolien de "Grand Bois" sur le territoire des communes de Montjay, Ribeyret, l'Epine et Sorbiers ;

Considérant qu'aux termes de l'article 10-1 de la loi susvisée du 10 Février 2000 : "Les zones de développement de l'éolien sont définies par le préfet du département en fonction de leur potentiel éolien, des possibilités de raccordement aux réseaux électriques et de la protection des paysages, des monuments historiques et des sites remarquables et protégés (...) " ;

Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le potentiel éolien du projet a été évalué à partir de relevés météorologiques établis par la station météorologique de Lus-la-Croix-Haute, située dans le département de la Drome, à plus de 40 km du projet litigieux, jugés "comparables" à la zone en cause : que, toutefois, les requérants soutiennent, sans, être contredits, que les conditions climatiques, le relief et la nature même des vents sont distincts entre ces deux zones, ce qu'a d'ailleurs confirme le relevé annuel établi postérieurement sur le site par la société Tencia, démontrant l'absence de rentabilité du projet en raison de l'insuffisance du vent ; que si le législateur n'impose pas au pétitionnaire de réaliser " des mesures de vent, qui peuvent s'avérer longues et coûteuses " comme le fait valoir l'autorité préfectorale dans son mémoire en défense, le projet doit néanmoins se fonder sur des évaluations et des informations météorologiques permettant une estimation des vents la plus réaliste possible au regard des caractéristiques propres de la zone étudiée ; que, dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que le potentiel éolien du projet a été insuffisamment apprécié en méconnaissance des dispositions précitées de la loi du 10 février 2000 et à demander, sur ce fondement, l'annulation de l’arrêté contesté,

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme G et autres d'une somme totale de 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE

Article 1er :
L'arrêté du préfet des Hautes-Alpes en date du 10 avril 2007 est annulé.

Article 2 : L'Etat versera à Mme G et autres une somme totale de 200 euros (deux cents euros) au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme G, à Mme B. à M. B, à M. B, à Mme K. aux communes de Montjay, l'Epine, Ribeyret et Sorbiers, à la société Tencia et au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire.

Copie en sera adressée, pour information, au préfet des Hautes-Alpes,
Délibéré après l'audience publique du 24 novembre 2008. à laquelle siégeaient
M. Bocquet- président.
M. Bernabeu. premier conseiller,
M. Haïli, premier conseiller,
Assistés de Mme Clément- greffier
Lu en audience publique le 4 décembre 2008,

Le rapporteur
Signé B. BERNABEU
Le président
Signé P. BOCQUET
Le greffier
Signé S. CLEMENT

La République mande et ordonne au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire en ce qui le concerne et a tous huissiers à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

Pour expédition conforme,
Pour le greffier en chef,
Le greffier,

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